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Pourquoi la '​'tolérance 0'​'​ peut favoriser le harcèlement au travail ?

Photo du rédacteur: Philippe ChevalierPhilippe Chevalier

Dernière mise à jour : 28 juil. 2022


Le dogme du o tolérance n'empêche pas le harcèlement
o tolérance et pourtant harcèlement

L'inacceptable ne se combat pas avec des slogans.

Le mot « tolérance » envoie le mauvais message, même précisé par le nombre 0 qui semble rassurant.

Le concept de tolérance 0 est un slogan qui porte en lui ses contradictions, le « 0 » laisse croire à l'absence de risque, alors qu’il s’agit en réalité de comportements humains et non de mathématiques.

Comparons deux slogans en milieu de travail :

- Ici tolérance 0 face au harcèlement au travail = impressionnant, mais qui fait quoi ? Qui vérifie ? À qui je m’adresse en cas de harcèlement? Qui s’engage ? Est-ce crédible ?

Ou bien :

- Ici nous vous protégeons de tout harcèlement au travail = Nous agissons, nous enquêtons, nous sommes responsables et intègres et nous nous engageons à vous protéger.

Cas 1 : Un employé pense subir du harcèlement, et il sait que l’entreprise applique une politique de tolérance 0. Mais qui va l’écouter vraiment si le harcèlement est supposé ne pas exister ? Que va-t-il déclencher comme tsunami s’il prétend qu’il existe une faille et que le harcèlement existe ? Oser a-t-il se manifester si le harcèlement est devenu tabou, car supposément réglé par un slogan ?

Cas 2 : Un employé pense subir du harcèlement de la part d’un collègue, mais il sait que la direction s’est engagée à le protéger, donc à l’écouter et à traiter toute plainte comme étant admissible (admissible ne veut pas dire nécessairement fondée). Sa plainte sera reçue et entendue dans les 48 heures, l’enquête diligentée immédiatement. Si le résultat conclut à un harcèlement, l’employé plaignant sera protégé. Si l’enquête conclu à l’absence de harcèlement, le collègue mis en cause à tort sera protégé lui aussi et l’employé plaignant le serait également dans la mesure où il a rapporté la situation de bonne foi.


Dans le cas 1, le harcèlement risque de perdurer même si une politique et une procédure existent.

Dans le cas 2, la direction a tenu son engagement : elle protège en agissant, elle prend le risque d'enquêter , c’est une question d’intégrité: l’entreprise dit ce qu’elle fait et fait ce qu’elle dit.

Alors pourquoi le concept de tolérance 0 est-il si populaire dans les politiques des entreprises ? Tout simplement parce que c’est du déclaratif impersonnel, et qui parfois peut dispenser l’entreprise de vérifier, d’enquêter et d’assumer les conséquences.

Si « tolérance 0 » signifie régler le problème en expulsant d’office les mis en cause pour rassurer et conforter les plaignants, alors un risque de dérive simpliste ne tardera pas à apparaître, un risque qui se lirait comme :

« On ne veut pas de harcèlement ici parce qu’on ne veut pas de problème, donc on condamne d’office les mis en cause, ainsi les plaignants seront satisfaits ou hésitants, mais ce sera dissuasif et on n’entendra plus parler »

La dissuasion portée par la tolérance 0 peut devenir de l’hésitation à se plaindre, par peur de la gravité du processus et des conséquences.


Le mot tolérance, même utilisé pour dire « pas de tolérance » est un mot faible. L’être humain ne retient pas les formules négatives. Dans l’expression « pas de tolérance » ou « tolérance 0 » on retient quand même le mot tolérance, dans l’expression « pas de problème » on retient le mot problème.

Mais dans « protéger », on retient l’engagement, la décision et l’action.

Cela peut sembler un débat sémantique ou philosophique, mais ce sont pourtant les mots qui déclenchent les réactions.


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